Non classé

Chine

03/10/2003 03:53 Objet : 1ères impressions de ChineNi hao ! Bonjour !

Ca y est, me voilà plongée en Chine, et en route pour m’enfoncer dans ce pays gigantesque que déja je voudrais pouvoir arpenter en long en large beaucoup plus longuement qu’un mois… Les proportions ne sont pas les mêmes qu’au Japon, et même à l’échelle d’une journée, ici à Pékin, je cours presque après mon temps ! Moins facile de traîner, de s’asseoir n’importe où puis repartir tranquillement. Je me suis quand même mise à le faire, passés les deux premiers jours, à arrêter le vélo de temps en temps. 

Objectif communication

J’ai trouvé un moyen de communication très efficace avec les Chinois : dessiner. Immanquablement, j’attire un attroupement, on se penche par-dessus mon épaule, on se plante devant ma vue (idéal pour dessiner…), les enfants s’appuient contre mes jambes, tout le monde commente, rigole, appelle son voisin… Je donnerais cher pour comprendre ce qu’ils peuvent bien se dire !

Tout à l’heure je pars en quête d’une méthode pour apprendre le chinois. J’ai trop envie de communiquer avec eux, et de comprendre plus la façon de raisonner que peut impliquer une langue tellement basée sur l’image.

C’est drôle, je passe de moments de galère et de difficulté, face à des gens speed qui vous indiquent n’importe quelle direction, pourvu que vous les laissiez à leur occupation (un mementum au goût parisien, qui me fait réfléchir à prêter particulièrement attention, au retour…), à – la plupart du temps – des rencontres simples et directes, des gens très curieux et souhaitant vivement m’aider.

C’est plus facile qu’au Japon, finalement, car les jeunes Chinois (en tout cas à Pékin, on verra ensuite au fin fond du Sichuan…) parlent l’anglais, et comme on leur dit à l’université de pratiquer dès qu’ils le peuvent avec des étrangers, je suis sans cesse abordée, dans les jardins, musées, partout où je ralentis le pas. De ce que j’entends du chinois, l’accent me paraît assez proche de l’anglais, et je trouve que les Chinois ont un bon accent quand ils parlent l’anglais, bien meilleur que nous les Français…

Les panneaux des rues sont presque systématiquement (encore une fois, à Pékin…) traduits en pinyin, ça facilite la tâche… Idem au supermarché, les produits (destinés à l’exportation, sans doute, par ces commerçants de Chinois ; et, sans doute aussi, entraînés par le marché de Hong Kong) portent souvent une traduction anglaise, on peut au moins savoir ce qu’est l’ingrédient de base du sachet, de la pomme de terre ou de la blate séchée… (c’est un des snacks que j’ai repérés, pas encore essayé ; on verra…).

Sur le continent de l’Inde

Je ne sais pas s’il va se passer la même chose à chaque changement de pays, mais il faut faire comme un « deuil » du pays précédent, auquel on s’était attaché, pour se lancer corps et âme dans le suivant. Ca y est, je suis dans la phase où tout est nouveau, tout est fascinant, de la brique posée sur le sol, au rouge délavé des murs impériaux, en passant par les tricycles surchargés, les cabines téléphoniques ovoïdes orange, les brochettes en tous genres que les gens promènent parfois à travers les rues, les marchés où l’on égorge les poulets et où s’étalent des organes dont on aimerait mieux ne pas trop s’approcher, les klaxons de tous les côtés, les drapeaux chinois qui mettent partout une note de rouge, en particulier sur la brique grise des hutong (ruelles de maisons traditionnelles, en passe de disparaître, ce encore plus à l’approche des J.O. 2008, pour lesquels on fait actuellement un grand ravalement…), les lanternes rouges, les pères Noël lumineux du quartier russe (!) , les énormes avenues, avec leurs salves de vélos, leurs bus defoncés (et bondés : il doit rester, des années dures du communisme, une peur de manquer ou de ne pas avoir de place, qui pousse les Chinois à systématiquement se ruer, l’objectif final primant sur les moyens à mettre en oeuvre, que ce soit le piètinement des voisins ou le planter de coups de coudes…), les gargottes partout où à toute heure on mange, ça sent si bon…

Le bruit aussi est très différent du Japon. Pas trop de hauts-parleurs (quelques-uns tout de même…), beaucoup de klaxons, de cris (je ne sais pas si le chinois se chuchote : ceux qui le parlent, merci de m’éclairer !). Peu de musique en ville : parfois, tonitruante, à l’entrée d’un magasin de disque, mais pas de façon omniprésente comme au Japon.

Peu importe ici l’esthétique : l’architecture, les restaurants, l’habillement (les ados eux-mêmes restent assez soft !) sont avant tout utilitaires ; on est loin de l’extrême raffinement du Japon.

De passer comme ça de l’un à l’autre, la différence entre ces deux pays, tout reliés qu’ils soient, par le faisceau d’influences lancé tous azimuts par la Chine vers ses voisins, mais aussi par la représentation poétique et mythique qu’on s’en fait depuis l’Occident, et aussi, finalement, par deux journées à peine en mer, me frappe de plein fouet. Sur le bateau j’ai pu commencer à la sentir, et aussi à en parler avec une Chinoise qui venait de finir sa thèse sur les relations socio-culturelles entre Chine et Japon, qu’elle avait étudiées en particulier à travers le prisme des nombreux émigrants du Japon venus en Chine pendant la deuxième Guerre Mondiale, qui reviennent au Japon trente ans plus tard, mais parviennent difficilement à s’y réinserer.

Premier choc culturel en arrivant à Tokyo le mois dernier. Deuxième ici, où je me suis immédiatement sentie sur le continent de l’Inde.

Des travaux partout. Tout est en perpétuelle reconstruction, semble-t-il. Dès la sortie de la gare, je me suis fait assaillir par une troupe de chauffeurs de taxis flairant le touriste à qui offrir de parcourir 2 km au prix du Pékin-Pétaouchnok… 

La vie d’expat’

Grâce à Juliette, je suis dans des conditions de rêve, chez Bertrand et Muriel, un couple de Français expatriés à Pékin pour 4 ans, après avoir déjà vécu 4 ans à Berlin, et avant d’enchaîner probablement avec 4 ans au Brésil. Bertrand travaille chez Valourec (équipement automobile et tuyaux en plastique). Ils ont quatre enfants, la dernière a trois mois, Muriel a dû rentrer accoucher en France l’année dernière en plein SRAS… A ce propos, ils disent qu’ils sont tombés de haut devant l’accueil qui leur a été réservé en France quand ils ont été rapatriés, à se demander, disent-ils, ce que les médias ont bien pu nous raconter en Europe. Leurs amis ne voulaient pas les voir avant le respect d’une quarantaine d’un mois ! En Chine c’était la panique, Pékin était fermée, mais la maladie n’avait rien de plus inquiétant, finalement, que les multiples petits organismes à faces microscopiques étranges, bacilles, virus et autres bactéries que l’on peut attraper tous les jours ici… Muriel m’a donné une paire de baguettes perso, d’ailleurs, à utiliser dans les endroits où l’on a tendance à rincer vaguement bols et baguettes avec le fond de la théière… Un bon vaccin contre l’hépatite n’est effectivement pas de trop…

Ils m’ont prêté leur vélo. Et sont partis cinq jours en vacances, c’est la fête nationale ici en Chine, un vrai bazar pour circuler, le pays entier se met en route. J’ai fait appel à une agence de voyage pour obtenir un billet de train pour Xi’an samedi, l’agent m’a rappelée hier soir à 21h pour me dire que ça marche, il a pu avoir une couchette ! 

Vouloir barrer un pays d’un mur

Hier, Grande Muraille : quatre heures de bouchons pour y arriver, dans un minibus bondé, enfumé… mais c’est la moitié du charme de l’expédition, l’autre étant la découverte de ce site tellement photographié, que s’il suffisait de cinq minutes d’ascenseur pour y arriver, cela perdrait en valeur… Il faisait très beau, il y a une jolie lumière d’automne ces jours-ci, les couleurs claquent. C’est impressionnant ce mur sur la crête, et les montagnes hachées des deux côtés de l’horizon. Quelle ambition, quand même, d’avoir voulu barrer un pays d’un mur !

J’ai rencontré dans le bus quatre jeunes Chinois, on a passé la journée ensemble, et la soirée au restaurant en arrivant à Pékin, un très bon moment.

Je ne peux pas tout raconter, même si l’envie ne me manque pas de continuer encore et encore…Je pense bien à vous tous,

Je vous embrasse,

Pauline 

Sent: October 17, 2003Subject: News from Yunnan

Merci pour vos mails ! le dernier un peu rapide que je vous avais envoyé était de Chengdu, capitale du Sichuan ; depuis deux jours je suis à Lijiang, petit paradis dans le Yunnan.

Encore un voyage épuisant pour y arriver (à chaque changement de région, c’est un après-midi plus une nuit dans le train, sur laquelle on enchaîne une journée de 8-10h de bus…), mais cette fois-ci je me pose, je me sens bien dans cet endroit.

L’auberge de jeunesse est propre et calme. Mes premiers draps propres depuis Pékin !! Il y a non seulement du savon pour se laver les mains dans les toilettes, mais un mitigeur ! Vous voyez à quoi on mesure le confort… Et avec ma carte de membre Hostelling International, je ne paye que 10 yuans par nuit (8-10 francs)…

Aujourdhui je vais louer un vélo voir un peu les environs. Demain, partir pour 2-3 jours de randonnée, dans ce qui a l’air d’être l’un des paysages les plus fabuleux livrés à l’imagination (d’après ceux qui en reviennent). On est à 2 400 mètres d’altitude, ici, je crois. Il fait beau, pas trop chaud, juste parfait. Le linge sèche vite, sur la terrasse de l’AJ qui domine les jolis toits chinois de la vieille ville.

Pur bonheur. Je me suis déclarée « en vacances », enfin, car la Chine n’est pas de tout repos ! Quelle énergie il faut pour affronter leurs « meiyou » (« non, il n’y a pas »), « bushi » (« non »), incompréhension totale le plus souvent ; et les « laowai » (« étranger »), et « hello » à tous bouts de champs, parfois j’ai envie de leur répondre « bonjour », j’en ai marre d’être assimilée sans distinction au monde occidental. Je réponds « ni hao« , en déformant la prononciation à la mesure de la déformation, souvent très ironique, qu’ils ont eux-mêmes appliquée à « hello » : voilà une solution qui paraît fonctionner. Heureusement, en visant les jeunes on a des chances de trouver quelqu’un qui parle anglais…

Malgré tout j’ai envie d’explorer encore et encore ce pays, d’apprendre du chinois et de revenir encore et encore, c’est si varié !

Je crois que je ne pourrai jamais retourner au restaurant chinois en France, tant ça n’a rien à voir. Et si varié, quand on change de région on ne retrouve pas les mêmes plats. Le Sichuan est réputé pour sa cuisine (tres épicée), et à raison : c’est sublime.

J’entends des avis très variés sur le Vietnam, mais je crois que je vais de toute façon aimer, comme tous les endroits vus jusqu’ici, malgré les galères (eh oui, Papa, j’avais répondu à ton mail à ce propos, malheureusement c’est celui qui n’est pas passé : of course tout n’est pas simple comme de l’eau claire (inexistante en Chine d’ailleurs…), mais je n’y pense même pas, ça fait partie intégrante du jeu, se planter de train (arrivé une fois au Japon), attendre 4h un bateau qui n’existe pas mais pour lequel on vous a vendu un ticket (la semaine dernière à Leishan, pour voir le plus grand Boudha du monde), 8h dans un minibus minuscule (jambes dans le menton) avec six Chinois ne parlant pas un mot d’anglais : heureusement il y a le paysage – hallucinant – dans lequel se plonger, quand on a épuisé toutes les ressources possibles pour communiquer… Et bien sûr les innombrables toilettes, tous plus incroyables les uns que les autres. Le record pour l’instant est détenu, je crois, par un trou obscur au fond d’une cour, auquel on accède après avoir enjambé la laisse d’un clébard agressif, cinq ou six poulets roucoulants, et la tête de deux porcs endormis dans la boue. Ce jour là, ça a été trop ; ils m’ont laissée faire pipi dans le ruisseau non moins réjouissant qui longe le mur de la cour… Quand on a compris les circuits de l’eau en Chine, on a tôt fait de se tenir éloigné des robinets, fruits et légumes…

Voilà, voilà, quelques news un peu plus détaillées !

Je suis en pleine forme, très heureuse toujours, et ultra reconnaissante à la terre et à la vie de me permettre de faire ça ! et à vous tous !

gros, gros bisous

pauline